1. Puisque par la Munificence de Dieu, nous allons célébrer aujourd'hui trois liturgies solennelles, nous ne pouvons commenter longuement ce texte de l'évangile. Mais la Naissance de notre Rédempteur nous invite à dire quelque chose, fût ce brièvement. Quelle raison de décrire le monde au moment où le Seigneur va naître si ce n'est, ce qui est évident, parce qu'en S'incarnant, celui-ci inscrirait ses élus dans l'éternité. Au contraire, à propos des réprouvés le prophète a dit : «Qu'ils soient rayés du livre des vivants et ne soient pas inscrits avec les justes ! »(Ps 68,29) C'est avec raison que le Christ est né à Bethléem : Bethléem signifie la maison du pain. Et de fait lui-même a dit : «Je suis le pain vivant descendu du Ciel.»(Jn 6,41) Donc le lieu où naquit le Seigneur avait été appelé précédemment maison du pain parce qu'il avait été prévu qu'apparaîtrait là sous sa forme corporelle Celui qui restaurerait les âmes des élus d'un rassasiement spirituel. Il est né non pas dans la maison de ses parents, mais en chemin, pour bien nous montrer que par la nature humaine qu'Il prenait, Il naissait comme à l'étranger. Je dis étranger, non selon son Pouvoir, mais selon sa Nature. Car au sujet de son Pouvoir, il est écrit : «Il est venu chez lui.» (Jn 1,1). En effet, selon sa Nature, Il fut engendré avant les temps, Il vint à la nôtre dans le temps. Car pour Lui qui existant éternellement, apparut dans le temps, Lui était étrangère la terre où Il descendit. Et parce que le prophète Isaïe dit : «Toute chair n'est que du foin.» (Is 40,6), le Fils de Dieu fait homme transforma notre foin en froment, Lui qui a dit de Lui-même : «Si le grain de froment tombant en terre ne meurt pas, il demeure seul.» (Jn 12,24). Aussitôt né Il est déposé dans une crèche pour restaurer du froment de sa Chair, tous les fidèles vivants et saints, cela pour qu'ils ne restent pas à jeun privés de la nourriture de l'intelligence éternelle. Pourquoi l'ange apparaît-il aux bergers qui veillaient et pourquoi la Clarté de Dieu les entoure-t-elle si ce n'est parce que méritent de voir les choses sublimes, de préférence à beaucoup d'autres, ceux qui savent veiller avec vigilance sur des troupeaux fidèles ? Pendant qu'ils veillent avec fidélité sur le troupeau, la grâce divine flamboie très abondamment au-dessus d'eux.
2. Or l'ange annonce la Naissance du roi et à sa voix les choeurs des anges chantent ensemble et clament avec joie : «Gloire à Dieu au plus haut des cieux et paix sur la terre aux hommes de bonne volonté.» Avant que notre Rédempteur ne naisse dans la chair, nous n'étions pas en harmonie avec les anges; nous étions fort éloignés de leur clarté, de leur pureté à cause du péché originel et de nos fautes quotidiennes. Parce que, pécheurs, nous errions étrangers à Dieu, les anges citoyens de Dieu, nous tenaient à l'écart de leur communauté. Mais parce que nous avons reconnu Jésus pour notre roi, les anges nous ont reconnu comme leurs concitoyens. Parce que le Roi du ciel a pris sur lui la poussière de notre chair, cette haute société des anges ne méprisera plus notre faiblesse. Les anges reviennent en paix avec nous, oublient la tension du désaccord précédant; ceux qu'ils considéraient auparavant comme des malades à rejeter, ils les respectent désormais comme des compagnons. C'est pourquoi Lot et Josué (cf Jos 5,15) se prosternaient devant les anges sans en être empêchés. Jean dans son apocalypse a voulu se prosterner devant un ange, mais cet ange l'en empêcha en disant : «Ne le fais pas car je suis ton compagnon et celui de tes frères.» (Ap 22,9). Pourquoi avant la venue du Rédempteur, les hommes se prosternaient-ils devant les anges et ceux-ci les laissaient-ils faire et pourquoi après sa venue les anges refusaient-ils ce signe de respect ? Ne serait ce pas que voyant élevée au-dessus d'eux une nature d'abord méprisée d'eux, ils ne voulaient plus la voir se prosterner devant eux ? Ils n'osèrent plus mépriser comme infirme cette nature qu'ils vénéraient évidemment comme supérieure dans le Roi du ciel. Et ils ne dédaignent plus de tenir l'homme pour leur compagnon eux qui adorent au-dessus d'eux l'Homme-Dieu. Veillons donc, frères très chers, à ce qu'aucune impureté ne nous souille, nous qui sommes par prédestination éternelle et les serviteurs de Dieu et les compagnons des anges. Reconnaissons donc par nos moeurs notre dignité, que nulle luxure ne nous souille, que nulle pensée honteuse ne nous accuse, que la malice n'ait pas prise sur notre esprit, que la rouille de l'envie ne nous ronge pas, que l'orgueil ne nous enfle pas, que l'ambition éveillée par les séductions terrestres ne nous déchire pas, que la colère ne nous brûle pas. Donc toi, ô homme, défends l'honneur de Dieu contre les vices, puisque, à cause de toi, Dieu s'est fait homme, Lui qui vit et règne dans les siècles des siècles, amen.